Le Plateau des Glières, au coeur de la Résistance en Haute-Savoie

Publié par Victoria Karel - -
"Vivre libre ou mourir" telle est la devise autour de laquelle la Résistance en Haute-Savoie s'est courageusement constituée. À l'hiver 1943-44, près de 500 maquisards vont réceptionner les parachutages d'armes des Alliés sur le Plateau des Glières. Situé à 1500 m d'altitude, ce haut lieu est aujourd'hui devenu un véritable symbole de la Résistance.

L'atmosphère qui règne au Plateau des Glières en dit long. Situé à une altitude moyenne de 1500 m, il s'étend majestueusement sur une surface de 85 km². Dominé par des parois rocheuses, le plateau des Glières a été le terrain d'importantes opérations de la Résistance haut-savoyarde lors de la Seconde Guerre Mondiale. Londres comprend vite que ce plateau agissant comme une forteresse naturelle, va jouer un rôle clé dans l'histoire française. De fin janvier au 26 mars 1944, les Résistants réceptionnent des armes pour équiper leur bataillon.


Le Plateau des Glières était en effet le lieu idéal pour faire parvenir par voie aérienne des armes à la Résistance... "Il n'y avait aucune route, la première a été créée en 1973. Il fallait marcher 5h dans la neige pour pouvoir y accéder, explique Victor Beausoleil, médiateur culturel du Département de Haute-Savoie. Avant d'ajouter : Pour faciliter le repérage des avions, les maquisards allumaient des bûchers au pied des parois qui servaient de repère à l'aviation. Les parachutages se faisaient rapidement tous les soirs de pleine lune."



Des Résistants d'ici et d'ailleurs...


À la réception, les Alliés sont sûrs de trouver un peloton de 465 maquisards. "La pluralité, c'est ce qui définit au mieux ce mouvement de résistance. On l'oublie souvent mais il ne regroupait pas seulement des Haut-Savoyards ", affirme le médiateur culturel. D'autres viennent de Marseille et de Paris fuyants tous le travail obligatoire en Allemagne, mais aussi de Pologne et d'Espagne. Ces derniers au nombre de 56 forment notamment l'ensemble du groupe aux techniques de guérilla. Des communistes, les Francs-Tireurs Partisans, rejoignent ensuite le mouvement.


Résistants s'occupant de la réception d'armes pour défendre la Haute Savoie



Réception des armes au Plateau des Glières ©Fonds Raymond Perrillat Association des Glières

"Ils avaient des idéaux différents, étaient de confessions différentes mais ils étaient réunis autour d'une même devise "Vivre libre ou mourir" et d'une même bannière, celle de la France libre." L'Armée Secrète de Haute-Savoie aussi appelée le maquis des Glières sera menée par le lieutenant Tom Morel. En parallèle, les Forces de l'Ordre du gouvernement de Vichy ayant eu vent de la Résistance, prennent position dans les vallées alentours. Le Lieutenant Morel tombe à Entremont en mars 1944 avec d'autres maquisards. Il est remplacé par le capitaine Maurice Anjot. Mais le peloton, encerclé par 5500 voire 7000 Allemands, continue de subir des attaques qui s'intensifient. Le Capitaine Anjot ordonne alors aux Résistants de décrocher et de rejoindre leur maquis d'origine. Près de 130 maquisards perdront la vie lors de cette manœuvre.



La Haute-Savoie libérée


Contre toute attente, les Résistants se reforment et réinvestissent en force le Plateau des Glières à l'été 1944. Le 1er août, le maquis des Glières fort de 3000 hommes, réceptionne un chargement de cent cinquante tonnes d'armes, le parachutage le plus gros réalisé en Haute-Savoie. "En 3 jours, les armes ont été dispersées à travers le département et en deux semaines, la Haute-Savoie est libérée sans interventions des forces alliées, poursuit Victor Beausoleil. C'est d'ailleurs ce détail qui fait la notoriété de la Résistance haut-savoyarde."


Comme la plupart de ses autres collègues médiateurs, Victor est originaire de la "Yaute". Il connaît l'histoire des Glières depuis son enfance : "Mes grands-parents sont porteurs de cette mémoire et me l'ont transmise... tout comme les rescapés qui sont à l'origine de l'Association des Glières, aujourd'hui maintenue par leurs descendants. On travaille beaucoup avec eux notamment pour la justesse des éléments historiques présentés à nos différents publics." C'est ainsi que les médiateurs peuvent ponctuer leurs discours d'anecdotes sur la façon dont vivaient les résistants ou sur leur alimentation...




Enterrement du lieutenant Tom Morel ©Fonds Raymond Perrillat Association des Glières

Les médiateurs culturels, des vecteurs de la mémoire du plateau des Glières


"Les résistants logeaient dans une cinquantaine de chalets d'été et étaient confrontés au froid glacial ; cet hiver-là a d'ailleurs été l'un des plus rudes. Pour limiter les engelures, ils se servaient du voile des parachutes pour se couvrir, raconte Victor Beausoleil. Pour ce qui de l'alimentation, 1,5L de lait servait à nourrir jusqu'à 30 maquisards, les moyens étaient limités..." Ces conditions de vie difficiles font de la Résistance haut-savoyarde, une véritable légende. "C'est une réelle opportunité en tant que médiateur de sensibiliser nos publics à ce fait historique si particulier et marquant." Au total, ils sont 4 médiateurs répartis sur le Plateau des Glières et sur le site de Morette.


Au Plateau des Glières, se dresse le monument national représentant la Résistance. Conçu par Emile Gilioli, le grand "V" symbolise la victoire : "Mais on voit que la lettre est coupée pour rappeler la victoire s'est faite au péril de la vie de maquisards et d'habitants. Quant au rond représentant le soleil, il est porteur d'espoir et de paix. Mais il est légèrement désaxé par rapport au V pour nuancer ce message de paix car il est toujours possible de retomber dans la guerre. Il faut rester vigilant."




Victor Beausoleil, médiateur culturel, véhicule la mémoire de la Résistance et l'histoire du Plateau des Glières.

Quant au site de Morette, haut lieu de mémoire, il regroupe un musée retraçant l'histoire du maquis, un mémorial de la déportation et la Nécropole nationale des Glières : "la création de sépultures dignes des défunts s'est faite dès 1944 grâce à l'Alsacien Louis Haase, alors maire de Thônes. Il souhaitait éviter la fosse commune pour ces hommes et a fait sa demande à la Gestapo qui a accepté. Cette nécropole en est la continuité et compte 105 tombes." L'importance de maintenir la mémoire de ceux tombés au combat est une valeur ancrée dans la culture française. "Chaque année, nous accueillons de nombreux collégiens sur ces deux sites pour des visites guidées. Cela permet aux jeunes de parfaire leur parcours pédagogique en Histoire. Et pour nous, médiateur culturel, la transmission est primordiale...", conclut Victor Beausoleil.


Dans cette même volonté de transmission, plusieurs randonnées autour et entre le Plateau des Glières et le site de Morette permettent aux randonneurs de marcher dans les pas des Résistants.



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