20 ans après l'incendie du Tunnel du Mont-Blanc, qui avait fait 39 morts, une cérémonie d'hommage a réuni plus de 300 personnes à Chamonix, dimanche 24 mars. Avant d'en arriver là, les familles des victimes ont dû se battre pour que les responsabilités soient reconnues.
Le
24 mars 1999, un camion belge en provenance de France, transportant farine et margarine s'engouffre dans le
tunnel du Mont-Blanc, un tube long de 11,6km qui
relie la France et l'Italie. Le véhicule s'embrase à mi-chemin. Il n'est pas encore 11h du matin.
Ensuite, c'est l'incertitude, pour les secours comme pour les familles des victimes. Sous la montagne, c'est l'apocalypse. L'enfer sous la glace. Les automobilistes sont pris au piège.
Trop de fumée. Trop de chaleur. La zone est
inaccessible pour les pompiers, et
la plupart des victimes meurent asphyxiées.
Il faudra
53h pour éteindre l'incendie, et plusieurs semaines pour identifier les 39 victimes, dans lesquelles figure un pompier,
l'adjudant-chef Georges Tosello.
Le Tunnel du Mont-Blanc a rouvert en 2002, après de lourdes rénovations. 32 familles se réunissent en association.Puis vient le temps de l'enquête et des responsabilités. Trois mois après la catastrophe,
un premier rapport d'enquête dénonce de « graves manquements à la sécurité », mais toujours pas d'explications pour les familles.
Face au manque d'accompagnement et à une
procédure trop lente, les familles s'organisent.
Marie-Ange Chantelot, qui a perdu sa mère, sa sœur et son beau-frère dans l'incendie,
monte l'Association des familles des victimes. «
C'était la seule solution pour accéder au dossier », explique-t-elle.
Une réunion nécessaire pour défendre leur intérêt, puisque
les victimes sont de neuf nationalités différentes.
En septembre 1999, 32 familles rejoignent l'association.
Le péage du Tunnel du Mont-Blanc, côté français.
« Un procès pas comme les autres »Le premier procès s'ouvre en 2005, au tribunal correctionnel de Bonneville. Il durera 3 mois, réunira
285 parties civiles et 80 avocats. L'objectif :
savoir ce qu'il s'est réellement passé et, enfin,
établir les responsabilités. « Un procès pas comme les autres », selon
Alain Jakubowicz, l'avocat des familles.
Deux ans plus tard s'ouvre le deuxième procès, à Chambéry cette fois-ci.
A l'issu des deux procès, la question des responsabilités est enfin réglée.
La société ATMB, le concessionnaire du tunnel et son homologue italien sont tous deux condamnés à 100.000 euros d'amende.
Gérard Roncoli, responsable de la sécurité du tunnel, écope lui de
30 mois de prison dont 6 fermes. D'autres gestionnaires sont par ailleurs condamnés. Le maire de Chamonix de l'époque, Michel Charlet, a été condamné en première instance à 6 mois de prison avec sursis et 1.500 euros d'amende. Gérard Roncoli et lui avaient fait appel, mais
seul le maire de Chamonix a bénéficié d'une relaxe, en 2007.
Des millions d'euros investis à travers le pays...Le tunnel rouvre en 2002, après des travaux de
400 millions d'euros, investis pour améliorer sa sécurité.
Aujourd'hui, la sécurité du tunnel est gérée par un groupement européen. Les normes de sécurité ont été revues, et 3 casernes de pompiers, situées aux deux extrémités et au centre du tunnel ont été construites.
Les procès ont marqué un
tournant dans la sécurité des tunnels, puisqu'à la suite de la catastrophe, des millions d'euros ont été investis pour revoir le fonctionnement des galeries souterraines à travers l'ensemble du pays.
Pour renforcer la sécurité, une salle de contrôle a été installée. Un outil de pilotage informatique recueille et analyse 36.000 données pour la sécurité.
A sa ré-ouverture en 2002, un réseau de 157 caméras est installé sur l'ensemble du tunnel, à raison d'une caméra tous les 300 mètres. 37 abris de sécurité ont également été construits.
La question du doublement du tunnel refait surface.Depuis, de l'eau a coulé sous les ponts. D'autres projets ont vu le jour, comme celui du
doublement du tunnel pour faciliter le passage des secours. La proposition a refait surface côté italien en janvier dernier.
Le refus a été catégorique pour le maire de Chamonix Eric Fournier, qui craint les conséquences de la
pollution du trafic routier sur la vallée et les conséquences de la
fermeture du tunnel pour la construction d'un second tube.
Lors de la commémoration du 24 mars dernier,
la ministre française des transports Elisabeth Borne a mis un point final au débat :
il n'y aura pas de doublement du tunnel du Mont-Blanc.
Mais la catastrophe demeure un traumatisme pour nombre de personnes. Chaque année, une
cérémonie d'hommage aux victimes est organisée, et, côté italien, motards français et italiens se rassemblent pour rendre hommage à Pier Lucio Tinazzi, surnommé « Spadino », un patrouilleur de sécurité à moto décédé dans l'incendie.
20 ans après la catastrophe, un mémorial orne toujours l'entrée du tunnel, en hommage aux 39 victimes.
Alicia Casteras a rencontré les habitants de la vallée qui ont vécu ce drame de près.
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